compositeur
pianiste

Erik Satie

May 17, 1866 - Honfleur (France) — July 1, 1925 - Paris (France)

Biographie

Erik Satie, de naissance Éric Alfred Leslie Satie, est un pianiste et compositeur français, né le 17 mai 1866 à Honfleur, en Normandie. Très vite, Erik et sa famille vont alterner entre la ville normande et Paris. Son père, normand, obtient un poste en tant que traducteur dans la capitale française, ce qui y fait déménager la famille alors qu’Erik n’a que quatre ans. Deux ans plus tard, en 1872, la mère d’Erik, qui est d’origine écossaise, décède, et le jeune garçon ainsi que son frère repartent vivre chez leurs grands-parents en Normandie, jusqu’à la mort de leur grand-mère en 1878, date à laquelle ils rejoignent leur sœur et le père dans la capitale. Ce dernier s’est remarié avec Eugénie Barnetche, pianiste et professeur de piano. Elle enseigne à Erik les bases de l’instrument, avec lequel il témoigne vite d’une certaine familiarité aussi bien qu’une certaine hostilité vis-à-vis de la musique en général, de l’enseignement de sa belle-mère et des institutions.

À 13 ans, le jeune pianiste entre au Conservatoire de musique de Paris pour étudier le piano, mais aussi des savoirs plus théoriques tels que l’écriture. Il est renvoyé deux ans plus tard et quelques plus tard, il est à nouveau admis en 1885 mais ne va pas au terme de son cursus et délaisse l’obtention de son diplôme pour s’engager dans l’armée, dont il parvient à se faire réformer quelques semaines plus tard.

Âgé d’environ 20 ans, il s’installe seul à Montmartre. Il y fréquente des cercles d’artistes et d’intellectuels tels que les poètes Mallarmé et Verlaine, Debussy (rencontré au cabaret Le Chat Noir et dont il sera témoin de mariage) ou encore Ravel. Il se lie d’amitié avec certains. Cet environnement intellectuel et créatif le pousse à réaliser ses premières compositions, qui traduisent son présumé anticonformisme : son premier recueil de quatre pièces pour piano, Ogives (1886), ne fait pas figurer de notations classiques telles que les barres de mesures, mais plutôt des commentaires personnels du compositeur. Deux ans plus tard, son second recueil pour piano suit avec les trois Gymnopédies. Ces deux cycles sont édités par l’intermédiaire de son père. Il entretient une relation sulfureuse avec la peintre Suzanne Valadon, relation artistiquement féconde dans la passion (neuf pièces pour piano Danses gothiques, 1889) et dans la rupture qui l’anéantit (Vexations, 1893).

Outre son anticonformisme vis-à-vis de l’académisme et des institutions, Satie se révèle avoir une personnalité atypique : il achète le même costume en plusieurs exemplaires, il fonde sa propre Église dont il est le seul régent et fidèle. Certains échanges ou témoignages font état de son caractère à tendance virulente. En 1898, ses moyens financiers lui font quitter Montmartre pour Arcueil où il occupe une chambre au confort modeste. Il reste très discret au sujet de sa situation financière. Il se réclame alors d’appartenance socialiste et s’engage dans certaines actions citoyennes de la ville.

À l’approche de la quarantaine, en 1905, Satie se réconcilie un peu avec l’académisme et suit des cours de contrepoint dans le style classique auprès des compositeurs Albert Roussel et Vincent d’Indy, à La Schola Cantorum que ce dernier a créée quelques années plus tôt. Il parvient au bout de son cursus et obtient un diplôme.

10 ans plus tard, il rencontre le dramaturge Jean Cocteau. Tous deux travaillent ensemble à la création du ballet Parade, en un acte, pour la compagnie des Ballets Russes de Diaghilev, créé au Théâtre du Châtelet en 1917. Le livret est écrit par le dramaturge, la musique composée par Satie, la scénographie est créée par Picasso et la chorégraphie par le danseur Léonide Massine. Satie et Cocteau n’hésitent pas à faire intervenir des sources sonores inédites, telles qu’une machine à écrire et des bouteilles, pour faire écho à l’inspiration cubiste du peintre. La musique du ballet est ainsi très mal reçue par le public et qualifiée de « bruit ».

La collaboration entre les deux artistes est néanmoins une source d’inspiration pour d’autres artistes, notamment le Groupe des Six formé à la même période et officiellement nommé en 1920. Trois ans plus tard, en 1923, l’école d’Arcueil est formée sous l’influence de Satie et d’Henri Milhaud par quatre jeunes compositeurs : Henri Cliquet-Pleyel, Roger Désormière, Henri Sauguet et Maxime Jacob. Dans ces mêmes années, le musicien rencontre d’autres artistes émérites tels que les peintres Picabia et Marcel Duchamp, ou encore Man Ray avec qui il s’initie à la réalisation de ready-made, les poètes Tristan Tzara et André Breton, et plus tard les écrivains Pierre de Massot, le philosophe Jacques Maritain, ou encore le compositeur Gabriel Pierné.

Début de 1925, l’état de santé de Satie se dégrade et il est hospitalisé. L’année précédente, il a composé la musique du ballet Relâche du chorégraphe Jean Börlin pour les ballets suédois, qui fut un échec cuisant et le laisse dans l’embarras financier. On lui diagnostique une cirrhose du foie, liée entre autres à sa consommation d'alcool lors de ses soirées parisiennes. Il meurt le 1er juillet 1925 à Paris, à l’âge de 59 ans.

Le Groupe des Six

Le Groupe des Six fait référence à un groupe de six compositeurs français, officiellement créé en 1920, par les musiciens Arthur Honegger, Darius Milhaud, Georges Auric, Louis Durey, Francis Poulenc et Germaine Tailleferre. Ces six musiciens se sont rencontrés au Conservatoire de Paris et ont pris l’habitude de rencontres musicales hebdomadaires, évoluant autour d’artistes à la réputation déjà établie, tels que Cocteau, Satie, le peintre suisse Émile Lejeune ou encore Braque et Picasso. En 1916, Satie et Cocteau fondent la Société des Nouveaux Jeunes sur la base de ces rencontres ; en découlent le Groupe des Six baptisé officiellement quatre ans plus tard, en réponse notamment au Groupe des Cinq russe. Satie et son acolyte resteront des modèles d’inspiration pour cette nouvelle génération de compositeurs de la musique française.

Ses œuvres principales

Au cours de sa vie, Erik Satie a composé une cinquantaine d’œuvres, plus de la moitié étant destinées au piano, mais aussi pour voix et formations orchestrales.

Ses œuvres les plus célèbres au piano sont les Gymnopédies (1888), trois pièces pour piano s’inspirant de la valse et dont le nom est inspiré de danses antiques grecques. Le tempo lent et les notes semblant comme suspendues attribuent des allures impressionnistes au recueil. Debussy orchestre la troisième et la première de ces danses en les inversant, en 1896. Les Gnossiennes, composées deux ans plus tard en 1890, sont une œuvre pour piano en sept parties, tirant leur nom du grec « gnosis » signifiant connaissance.

Satie compose également des pièces vocales dont la Messe des pauvres (1895) pour orgue et chœur et Socrate (1918), un drame symphonique en trois mouvements s’appuyant sur des extraits du Banquet, de Phèdre et de Phédon de Platon. La pièce est destinée à une mezzo-soprano accompagnée au piano ou à l’orchestre. Satie compose également une quinzaine de mélodies en cycles ou seules, témoignant de sa culture littéraire et philosophique mais également de son inspiration impressionniste voire cubiste, et d’une pointe d’humour ou de sarcasme. Par exemple, le cycle de cinq mélodies Ludions (1923) met en musique les poèmes de Léon-Paul Fargue, donnant lieu à des intitulés tels que « l’air du rat » ou « la grenouille américaine ». Son premier cycle de Trois Mélodies : Les Anges, Élégie, Sylvie (1886), est souvent chanté et a un style plus romantique et proche des codes de la mélodie française que d’autres de ses compositions.

Satie a composé cinq musiques de scène, principalement pour des ballets à l’exception du Piège de Méduse, une comédie lyrique en un acte, sur un livret qu’il a lui-même écrit en 1921. Enfin trois compositions de musique de chambre sont répertoriées, par exemple la fanfare composée en 1921 pour deux trompettes, intitulée Sonnerie pour réveiller le bon gros roi des singes (lequel ne dort toujours que d’un œil).

L’œuvre de Satie est difficilement attribuable à un style ou un mouvement. S’il rejette l’académisme musical, il ne s’en défait pas pour autant. Ses créations semblent empruntées d’impressions diverses, et d’inspirations toutes aussi riches et variées provenant des arts. Il est parfois rattaché au symbolisme musical, en pleine effervescence et croisant les arts, et à l’impressionnisme. Il est considéré comme précurseur de certains mouvements postérieurs tels que le minimalisme ou le néo-classicisme.