Evgeny Kissin interprète Chopin et Schumann : Nocturnes, Mazurkas et Fantaisie en ut

Ils se rencontrent assez tôt : « Chapeau bas, Messieurs, un génie ! » écrit Schumann en 1931 avant d'insérer dans Carnaval une pièce intitulée « Chopin » et de lui dédier en 1838 ses Kreisleriana. Chopin lui dédicace, en retour, sa Ballade, op. 23. Pourtant, les deux compositeurs, musiciens et poètes, n'ont pas tout à fait la même appréhension technique de la forme narrative.

Chopin charge d'émotion chaque note, mais est fidèle à Bach, tout en restant un maître de l'architecture, de la ligne et du contrepoint. Les Mazurkas sont le carnet de voyage de son âme, sa patrie rêvée jusqu'à sa mort, et son art du bel canto au clavier est à jamais lié à ses Nocturnes, poèmes de la nuit et de l'amour, témoins de la simplicité recherchée, « la dernière chose » selon lui.

Schumann cherche en combattant l'équilibre des contraires. Soit il maintient un même rythme obsédant, comme dans la Toccata, soit il provoque de constantes interruptions, changeant brusquement ses tempi comme dans la Fantaisie, op. 17, merveille de déséquilibre dans l'équilibre. Son grand art est de faire un tout avec le matériau le plus disparate, de créer une œuvre unifiée à partir de miniatures.