La musique tchèque, une musique imprégnée de folklore
À la fin du 19e siècle, la musique tchèque connaît une transformation majeure, portée par des figures comme Bedřich Smetana et Antonín Dvořák. Dans un contexte de domination autrichienne et hongroise, les Tchèques cherchent à affirmer leur indépendance culturelle, et la musique devient un excellent moyen de revendiquer une puissante identité nationale. C'est précisément en puisant dans le folklore populaire que les compositeurs tchèques parviennent à se détacher de l’influence des compositeurs allemands et autrichiens et à créer une œuvre musicale qui reflète leurs racines nationales. Smetana, dans son Ma Vlast (Ma Patrie), utilise les paysages et les légendes tchèques pour créer une symphonie qui incarne l’histoire et l’âme de la Bohême. À travers la mélodie de la Moldau, il unit le cours du fleuve et les danses populaires pour symboliser l'unité du pays. Quelques années plus tard, Dvořák poursuit ce travail, mais avec une vision et une ambition plus internationale. Dans ses Danses slaves, il mêle les rythmes de la mazurka et de la polka à des structures classiques, et attire ainsi l’attention au-delà des frontières de la Bohême. En intégrant des instruments traditionnels comme la cithare et la flûte de pan, il s'affirme également comme un ambassadeur de la musique tchèque sur la scène européenne. Dans cette quête d’indépendance et de reconnaissance musicale, les compositeurs tchèques voient l’opportunité de reconnecter avec le folklore de leur nation. Leur œuvre devient alors une réponse aux tensions politiques et culturelles de l’époque, un moyen pour la Bohême de s’affirmer à travers l’Europe.
Les œuvres majeures du répertoire tchèque
Les œuvres emblématiques de Janáček
Leoš Janáček (1854-1928) a consacré sa vie à traquer la vérité dans la musique. « Cherchez en vous et soyez vrais », répétait-il à ses élèves : cette exigence guide toute son œuvre. D’abord organiste et maître de chœur, il se tourne tardivement vers la composition. Dès 1886, il collecte des thèmes folkloriques et développe une écriture vocale originale, centrée sur la prosodie et le rythme de la langue. Cette attention à la parole le conduit naturellement à l’opéra. Avec Jenůfa (1918), sa célébrité s’étend au-delà des frontières tchèques. Suivront La Petite Renarde rusée, L’Affaire Makropoulos et De la maison des morts, où réalisme, émotion brute et humour discret se conjuguent. Janáček explore également la musique de chambre et les pages solistes avec intensité. Dans le domaine orchestral, sa Sinfonietta illustre à merveille sa capacité à transformer le folklore pour en faire un bijou d’orchestration. Ses Quatuors à cordes n° 1 et n° 2 et la Sonate pour piano révèlent des pages sombres et intimes, mêlant tension dramatique et mélodie chantante. Les Sonates pour violon et piano ou pour violoncelle et piano montrent son goût du dialogue subtil entre instruments. Certaines pièces s’inspirent de la vie quotidienne et des sons de la nature, comme dans la Sonate pour violon et piano, où le rythme et le phrasé évoquent le chant des oiseaux. Son langage, hors des systèmes et des modes, s’attache à explorer les harmonies et les mélodies naturelles que recèlent les traditions folkloriques, offrant une œuvre profondément humaine.
Les œuvres emblématiques de Dvořák
Antonín Dvořák (1841-1904) incarne l’âme slave dans toute sa force et sa douceur. Son Concerto pour violoncelle, aujourd’hui l’un des plus joués du répertoire, cache derrière son lyrisme éclatant un hommage discret à Josefa, sa belle-sœur, dont il reprend une mélodie qu’elle aimait chanter. En 1893, lors de son séjour en Iowa, Dvořák compose en treize jours à peine son Quatuor « Américain », nourri des couleurs des spirituals et des chants amérindiens. Deux ans plus tôt, il avait déjà signé le trio Dumky, une œuvre singulière qui abandonne la forme traditionnelle pour s’articuler autour de six dumky successives : pièces slaves au caractère changeant, passant de la méditation la plus intime à des élans soudains de fougue et de virtuosité. À l’opéra, il laisse une empreinte durable avec Rusalka. Son « Chant à la lune » demeure l’une des pages les plus envoûtantes du répertoire lyrique, condensé de poésie et de mystère. Mais c’est surtout avec la Symphonie « du Nouveau Monde » que Dvořák acquiert une renommée internationale : un pont entre Europe et Amérique, entre tradition et modernité. Enfin, ses Danses slaves (op. 46 et op. 72) rendent hommage aux rythmes et aux mélodies de sa Bohême natale.
Les œuvres emblématiques de Smetana
Bedřich Smetana (1824–1884) est l’un des fondateurs de la musique classique tchèque telle qu’on la connaît aujourd’hui. Qualifié par beaucoup de « père de la musique tchèque » et auteur d’environ 150 œuvres, il s’est consacré principalement à la musique lyrique et orchestrale, mais a également composé pour le piano et la musique de chambre. Ses premières pièces pour clavier, comme les Six pièces pour piano (1848) dédiées à Liszt, révèlent l’influence du romantisme allemand et des modèles comme Chopin ou Schumann. Plus tard, ses Danses tchèques (1877–1879) célèbrent les rythmes et thèmes authentiques du folklore local, en réponse aux Danses slaves de Dvořák. Smetana s’affirme également comme compositeur d’opéra. Les Brandebourgeois en Bohême inaugure l’usage du tchèque sur scène. Avec La Fiancée vendue (Prodaná nevěsta, 1866), il mêle opérette et opéra-comique autour de personnages ordinaires, tandis que Libuše (1872) et Dalibor (1868) puisent dans les légendes et l’épopée nationale. Mais c’est dans le cycle symphonique Má Vlast (1874–1879) que Smetana laisse son empreinte la plus mémorable. Vltava ou La Moldau illustre le fleuve traversant la Bohême, mêlant tonalités mineures et majeures pour traduire la nature et la fierté de son pays.
La musique tchèque sur medici.tv
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La musique tchèque aujourd'hui
La musique tchèque du 20e siècle
Au 20e siècle, la musique tchèque poursuit l’élan de Smetana, Dvořák et Janáček, tout en explorant de nouvelles formes et couleurs, avec la volonté d’inscrire un souffle plus moderne aux traditions tchèques. Bohuslav Martinů (1890–1959) ouvre la voie avec ses œuvres lyriques et orchestrales, comme La Revue de Cuisine (1927), ballet teinté de jazz, et Les Larmes du couteau (1928), un opéra d’avant-garde. Son Nonette (1959), composé en exil, exprime la nostalgie d’une patrie lointaine. Janáček, déjà figure fondatrice, influence fortement ses contemporains et élèves. Ses opéras La Petite Renarde rusée (1923) et sa Sinfonietta (1926) mêlent folklore, harmonie novatrice et sens aigu du rythme de la langue. D’autres compositeurs enrichissent ce patrimoine : Jaromír Weinberger (1896–1967) avec son opéra Švanda Dudák, qui allie humour et folklore ; Jan Kunc (1883–1976), élève direct de Janáček, dont les poèmes symphoniques et œuvres chorales explorent le dialogue entre tradition et modernité ; et Theodor Schaefer (1904–1969), théoricien et pédagogue qui développe le principe diathématique – une technique qui consiste à créer de nouveaux thèmes en transformant ou combinant des fragments de thèmes déjà utilisés, pour assurer cohérence et continuité à l’ensemble de l’œuvre. Le 20e siècle tchèque illustre le renouveau de sa musique, où tradition et modernité se conjuguent pour réaffirmer une identité musicale originale et profondément nationale.
Les festivals qui honorent la musique tchèque
La musique tchèque trouve chaque année un écrin unique dans ses festivals, véritables rendez-vous de l’âme nationale. Le Printemps de Prague (Pražské jaro), fondé en 1946, reste le plus emblématique. Il s’ouvre chaque 12 mai, anniversaire de la mort de Smetana, avec Má Vlast et son poème Vltava, célébrant le fleuve traversant la Bohême. Le Dvořák Prague Festival, début septembre, met à l’honneur Dvořák et ses contemporains. Symphonies, concertos et œuvres de chambre sont interprétés par la Philharmonie tchèque et des solistes de renom, offrant un panorama complet de son lyrisme et de son goût du folklore. Plus ancien festival de musique du pays, le Festival Smetana de Litomyšl célèbre chaque été le compositeur natif de la région, dans le cadre historique du château de Litomyšl. Une véritable plongée au cœur de la vie et de l’œuvre du « père de la musique tchèque » ! Plus au sud, la Moravie, région historique de la République tchèque, s’anime au rythme du Concentus Moraviae, festival itinérant qui investit églises, châteaux et cours, mêlant musique baroque, jazz et folklore local. De manière plus épisodique, les compositeurs tchèques trouvent aussi leurs hommages à l’international, comme l’édition 2025 du Bard Music Festival de New York, qui consacre sa 35e édition à Bohuslav Martinů. Autant de festivals qui célèbrent avec magnificence l’identité tchèque tout en offrant une fenêtre ouverte sur son histoire, son folklore et sa virtuosité musicale.