compositeur

Paul Dukas

October 1, 1865 - Paris (France) — May 17, 1935 - Paris (France)

Biographie

« La musique, avant tout, doit émouvoir, charmer, troubler, exalter, et surtout faire rêver. »

C’est en ces termes que Paul Dukas synthétise lui-même la grande recherche de sa vie de compositeur. Derrière l’homme discret à la personnalité introvertie travaillait un esprit d’une inventivité et d’une sensibilité rares, en perpétuelle réflexion sur les couleurs, les influences et le futur de la musique. Découvrons aujourd’hui la vie et l'œuvre d’un compositeur atypique et novateur, qui a révolutionné l’orchestration et les thématiques traditionnellement explorées par les compositeurs classiques. 

Biographie

Paul Abraham Dukas naît le 1er octobre 1865 dans une famille parisienne d’origine modeste. Sa mère, pianiste, meurt alors que le petit Paul n’a que quatre ans. Il se prend peu à peu de passion pour la musique et entre finalement à l’âge de 9 ans au Conservatoire de Paris. Il s’y distingue par son talent exceptionnel. Élève de Théodore Dubois puis d'Ernest Guiraud, Dukas remporte de nombreux prix, dont le prestigieux Prix de Rome en 1890. Pourtant, cette ascension rapide ne correspond pas au caractère discret et rêveur du compositeur français, qui aspire au calme et le trouve dans le travail. Il aime se réfugier des heures dans la vaste bibliothèque de son père, et consacre parfois des mois entiers à réécrire patiemment certaines partitions qu’il admire.

La perpétuelle recherche d’un style musical innovant le conduit à fréquenter d'autres figures musicales de son époque. Dans cette période exceptionnelle de découvertes créatives et de renouvellement formel, Dukas côtoie des personnalités aussi marquantes que Ravel, Debussy, Berlioz ou Strauss. Vous pouvez retrouver certaines des œuvres phares de ces compositeurs français dans notre playliste dédiée à la musique française. Passionné par la profusion et la richesse des idées musicales de ses contemporains, Dukas se fait aussi critique et publie régulièrement sa vision de la composition dans la Revue Hebdomadaire. 

Sa vie simple, illuminée par l’arrivée tardive, à 50 ans révolus, d’un mariage et de la naissance de sa fille unique, sera marquée par l’admiration continuelle de ses pairs. Fervent défenseur de la musique française et de ses idées, Dukas n’hésite pas à la faire connaître en retravaillant certains des morceaux oubliés de Rameau ou Couperin. Pour l’ensemble de ce travail, Paul Dukas est fait chevalier de la Légion d’honneur en 1906 puis membre de l’Académie française en 1934. 

Apport de Dukas à la musique

Grand orchestrateur, Dukas se plaît à créer de nouvelles textures sonores, riches et complexes. Très perfectionniste, son souci du détail dans l'arrangement orchestral le pousse à explorer de nouvelles possibilités harmoniques voire à rebattre complètement les cartes de la palette orchestrale traditionnelle. Il y incorpore des harmonies chromatiques et parvient ainsi à créer une dimension expressive très caractéristique de son style. Dukas apprécie particulièrement le développement polyphonique et en superpose les lignes mélodiques jusqu’à créer un paysage musical complexe et poétique. 

Son goût prononcé pour la littérature lui permet également d’explorer des thématiques nouvelles. Son célèbre poème symphonique L 'Apprenti sorcier se fonde sur le texte d’un poème de Goethe, tandis que son opéra le plus connu, Ariane et Barbe-Bleue, s’inspire de la réadaptation théâtrale d’un conte traditionnel par le librettiste Maeterlinck. Sa Mélodie sur un poème de Ronsard ou son Polyeucte, une ouverture pour un drame de Corneille, sont autant d’autres exemples du lien synesthésique étroit que Dukas perçoit entre la musique et les mots. 

L’intelligence du style de Dukas vient également du dialogue étroit qu’il entretient avec le travail de ses contemporains. Il admire particulièrement l’inventivité mélodique de Claude Debussy et son Prélude à l’après-midi d’un faune, que vous pouvez découvrir parmi d’autres trésors dans notre collection d’œuvres de Debussy. En réponse à cette pièce et en hommage au compositeur disparu deux ans plus tôt, Paul Dukas écrit la Plainte au loin du faune qu’il fonde sur le thème principal de Debussy. On dira aussi que les choix d’orchestration dans son unique opéra, Ariane et Barbe-Bleue, sont intimement liés à ceux de Debussy dans Pelléas et Mélisande. 

Postérité de Paul Dukas et de son Œuvre

Dukas tient un rôle à part dans l’histoire de la musique française du 20e siècle. Né en pleine période symboliste, il adhère à ses thématiques et fait souvent de l’imaginaire le centre de son discours musical. Il reste pourtant un compositeur classique, ordonné et réfléchi. Grand orchestrateur, il construit lentement et patiemment l’architecture de ses œuvres, dans lesquelles l’équilibre est vecteur d'émotions.

Seules une douzaine des œuvres de Paul Dukas nous sont parvenues. L’artiste, très perfectionniste, a détruit toutes celles qu’il ne considérait pas suffisamment abouties. Citons trois œuvres majeures :

  • Son poème symphonique L’Apprenti Sorcier fonde évidemment sa postérité. Cette partition inventive s’appuie sur des thèmes au développement quasi-cinématographique : on entendrait presque le balai enchanté courir ou les trombes d’eau tomber lourdement sur le sol ! La réutilisation par Walt Disney de L’Apprenti Sorcier de Dukas dans son film d’animation Fantasia en 1940 a aussi permis à l'œuvre de rencontrer un plus large public, qu’elle séduit encore aujourd’hui ;
  • Le succès de Dukas doit aussi beaucoup à l’incroyable inventivité de son opéra, Ariane et Barbe-Bleue. Dukas s’y distingue par l’exploration des émotions intenses des personnages à la seule aide de l’orchestration et de la musicalité des chants. Il dira lui-même dans un épisode de la Revue : « Il faut que l’interprétation d’Ariane rende sensible aux spectateurs le drame intérieur de l’héroïne que la musique exprime d’autant plus intensément que les paroles prononcées sont ‘indifférentes’ » ;
  • Enfin, c’est avec son poème dansé La Péri que Dukas signe sa composition la plus rigoureuse et la plus sensible. Elle représente la dernière composition publiée par le compositeur. Très sophistiquée, La Péri combine habilement l’harmonie tonale romantique à des techniques d'orchestration impressionnistes.

Si Dukas n’a laissé à la postérité qu’un catalogue d'œuvres restreint, sa culture, son exigence envers lui-même et envers les autres en ont fait l’un des professeurs les plus renommés du Conservatoire de Paris et de l’École normale de musique de Paris. Parmi ses élèves les plus célèbres se trouve notamment Olivier Messiaen, dont le travail d’orchestration reste empreint de l’influence de son maître.