Concert

Kurt Sanderling dirige Schumann et Mahler

BBC Proms, 1988

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Casting

BBC Philharmonic Orchestra

Kurt Sanderling — Chef d'orchestre

Programme

Que peut-on glaner en regardant Kurt Sanderling aux BBC Proms à Londres en 1988 ? Au pupitre, Sanderling est détendu et souriant dans la symphonie de Schumann, une œuvre qu'il a sans nul doute dirigée d'innombrables fois en Allemagne (il le fait par cœur au Royal Albert Hall). Ce n'est absolument pas une interprétation agressive : le premier mouvement est moins agité qu'il ne l'est parfois, le mouvement lent a une chaude lueur intérieure, les contrastes entre le scherzo et le trio sont bien amenés, mais, heureusement, pas exagérés, et le finale est assez rapide, mais jamais furieux. Les transitions entre les mouvements – question apparemment mineure, mais qui préoccupa toujours Schumann, qui relia les quatre mouvements de la symphonie – sont amenés de manière belle mais discrète. Bien sûr, cela pourrait être lié à l'acoustique spacieuse du lieu, et je pense que Sanderling est attentivement à l'écoute de ses musiciens. L'orchestre de la BBC établi à Manchester eut la chance de l'accueillir comme chef invité régulier, après une première rencontre réussie quelque treize ans auparavant – alors que Sanderling avait déjà plus de soixante ans ! Alos à ce Prom, ils se connaissent bien.

Et cela se voit, aussi, dans le Mahler qui occupe le reste du programme. Aujourd'hui encore, Das Lied von der Erde (Le Chant de la Terre) est assez rarement donné en concert, notamment en raison de la simple difficulté à trouver non pas un, mais deux solistes adéquats. Le ténor doit être à l'aise dans le registre souvent aigu, tout en restant capable de survoler confortablement l'orchestre, l'alto (ou la mezzo est poussée à ses limites, musicales et dramatiques, dans le sixième et dernier lied, le long adieu soutenu de Der Abschied. Nous savons tous combien Mahler mit de lui-même dans cette étonnante vision de la Fin. John Mitchinson fut pendant de nombreuses années le ténor britannique de choix dans cette œuvre – on connaît la célèbre version de la même œuvre, avec ce même orchestre, sous la direction de Jascha Horenstein, qui date de quinze ans auparavant ! Carolyn Watkinson pourrait sembler un choix surprenant pour une partie dominée à l'époque par des cantatrices comme Janet Baker et Yvonne Minton, d'autant que Watkinson était souvent considérée à l'époque comme une spécialiste du baroque, le plus à l'aise dans Purcell, Bach ou Haendel. Ici, toutefois, elle démontre admirablement les dangers de ce genre d'étiquettes, avec une interprétation à la fois intense et rayonnante de conviction intérieure.

Le Mahler de Sanderling se révèle avoir les mêmes vertus que son Schumann. Il n'est jamais déchaîné ni frénétique, peut-être même pas tragique. Au lieu de quoi c'est une musicalité plus profonde qui est en évidence, où les notes viennent d'abord – et l'articulation musicale, et les talents des musiciens –, et où la musique « parle » à travers elles. Comme nous le disions au début, Kurt Sanderling faisait partie d'une lignée de plus en plus rare. Cette soirée mémorable, maintenant préservée pour la postérité, est un beau témoignage sur son art spécial à l'occasion du centenaire d'un chef spécial.

Source : Piers Burton-Page / ICA
Traduction : Dennis Collins

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